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Boomerang, épicerie indépendante en vrac, labellisée Bio, pour une consommation écologique et responsable

Genèse

L’Epicerie Boomerang a été créée à Mouans Sartoux début 2016 par Laura Giacco et Thomas Franchi, diplômés en management et marketing.

Après avoir vécu des expériences professionnelles qui leur sont apparues en décalage avec leurs valeurs, Laura et Thomas ont eu la volonté d’agir de manière positive pour un nouveau mode de fonctionnement économique. Nourris par leur implication dans des associations – Colibris, projet cueillette solidaire – ils ont suivi la formation bio de la Ferme Sainte Marthe, puis se sont lancés dans un projet d’épicerie en vrac, bio et local.

Le concept de l’épicerie est de proposer un lieu convivial où l’on trouve tous les produits alimentaires et non alimentaires du quotidien en vrac et donc sans emballage à usage unique. L’objectif est de proposer des produits de qualité, si possible locaux et en circuit court, au juste prix pour une clientèle consciente de l’impact écologique de sa consommation. Pour permettre d’aller au bout de la démarche, l’épicerie s’est dotée d’un outil de lavage professionnel afin de proposer un service de bouteilles consignées.

Bien loin de la maximisation des profits que l’on rencontre habituellement en économie linéaire, l’enjeu ici est de valoriser la réduction des déchets à la source et d’alimenter une chaîne de valeur vertueuse pour l’environnement. Des bénéfices difficilement quantifiables, mais qui ont une incidence pratique dans notre quotidien : « on gaspille moins et l’on sort moins la poubelle ». Ainsi, en consommant dans cette épicerie on va  :

Réduire : Le vrac, c’est acheter la juste quantité pour réduire le gaspillage alimentaire, acheter au juste prix, réduire ses déchets ménagers.

Réutiliser les contenants : Les clients peuvent apporter leurs propres contenants et ainsi augmenter la durée de vie des ressources. Les bouteilles consignées sont partagées : privilégier l’utilisation sur la possession.

Refuser : En limitant l’approvisionnement pour certains produits à des zones de production locales et régionales, l’épicerie dirige la demande vers des produits transformés ou créés le moins loin possible, quitte à ne pas la satisfaire (fruits et légumes locaux et de saison, valorisation des artisans locaux).

L’épicerie en chiffres

Magasin de 60 m2, ouvert 8h par jour, 5j par semaine.

Trois salariés: Laura et Thomas à plein temps, une salariée en alternance 3j par semaine.

900 produits de tout type, provenant de 100 fournisseurs.

Entre 40 et 50 clients par jour pour un panier d’environ 15 euros.

Plus 3000 bouteilles consignées en circulation, nettoyées et remises en circulation sur place.

30% des clients font leurs courses entièrement avec leurs contenants et consignes.

Réduction des déchets d’emballage au niveau local pour 50 personnes par jour.

Description des paramètres économiques et financiers

Lors du montage en 2015, Boomerang a obtenu deux prêts d’honneur de la part d’Initiative Terre d’Azur (taux 0%, 8000 € chacun). Un financement participatif KissKissBankBank (177 personnes pour un montant de  7700 €) a permis à l’épicerie de s’équiper d’un outil de lavage de bouteilles.

Sur 3 ans, on observe une croissance de 10% du chiffre d’affaires par an. 35% du chiffre d’affaire est généré par des produits locaux (rayon de 250 km).

En outre, Boomerang est un acteur de l’ESS à différents titres:

Au niveau des fournisseurs : relocalisation de l’économie avec le concours des artisans locaux avec lesquels l’épicerie échange les contenants, des entreprises d’insertion pour les légumes, les fruits, la confection de biscuits…, des associations. Ils s’appuient sur la bonne volonté des producteurs et associations qui font l’effort de modifier leur mode de distribution en faveur du Zéro Déchet.

Au niveau de l’emploi : l’épicerie accueille en partenariat avec la Mission locale et Les Jardins de la Vallée de la Siagne, centre d’insertion par le travail, des stagiaires en difficulté. Le but pour eux est d’expérimenter une mise en situation de travail pour reprendre confiance dans le monde du travail. L’épicerie a accueilli plus de 10 stagiaires, dont l’une a été recrutée en alternance vente en milieu rural, afin de contribuer au développement de l’épicerie.

Les bénéficiaires de l’épicerie Boomerang dépassent ceux d’un commerce conventionnel pour englober l’ensemble des acteurs de l’écosystème dans lequel s’inscrit l’épicerie : outre les porteurs de projets, les clients, les fournisseurs, ils incluent les collectivités locales qui bénéficient de la réduction des déchets.

Description des paramètres juridiques

L’épicerie boomerang est une SARL créée en octobre 2015 sous le nom commercial Vrac Lab.

Description du mode de gouvernance

« Le projet est dirigé par Thomas et Laura, les créateurs. Ils pilotent Boomerang à partir de tout ce qui vient, la prise de décisions est nourrie par tous les apports des réseaux, clients, fournisseurs, partenaires qui interviennent directement dans le processus opérationnel du magasin (conseils, partage, envie,…).

Le projet ne consiste donc pas seulement en l’évitement des déchets mais en une réflexion beaucoup plus large sur la notion de l’essentiel. Il s’agit de faire du magasin un lieu de convivialité, d’expérience sensorielle et d’accompagnement, ce qui n’est pas présent dans d’autres magasins de vrac. Il y a aussi une recherche systématique, quand cela est possible, de partenariat étroit avec les fournisseurs locaux, dans une logique réciprocitaire.

Le magasin est un lieu d’échange et d’expression. Par l’implication des clients, la pédagogie va dans les deux sens, le magasin est un lieu de convivialité et d’échanges permanents.

Le projet génère des envies de contribuer par le bénévolat, mais il existe une difficulté à aller plus loin dans l’implication d’autres acteurs dans la gouvernance (à cause du statut SARL). Il y a des pistes d’améliorations, par exemple, accepter la participation de bénévoles lors de manifestations. »

Extrait remanié de l’expertise ESS réalisé par Geneviève Fontaine, T.E.T.R.I.S.

Temporalités du montage

2014 : Sourcing des producteurs et contact avec les associations locales

Fin 2015 : Création de la SARL Vrac Lab, obtention des deux prêts d’honneur, succès du financement participatif qui permet à l’épicerie de s’équiper d’un outil professionnel de lavage de bouteilles consignées

Janvier 2016  : Ouverture de l’épicerie après presque un an et demi de préparation

Septembre 2016 : Certification Agriculture Biologique par Qualisud

Octobre 2016 : Début de la vente ambulante zéro déchet en mobilité douce avec le vélo-vrac lors de manifestations ponctuelles

Mars 2017 : Mise en place d’un jardin partagé de quartier avec les habitants, les associations et les commerçants

Mai 2017 : Organisation du 1er festival zéro déchet avec la participation d’associations du territoire pour sensibiliser le grand public sur cette thématique

Description des paramètres humains

Au niveau des clients: développement d’un mode de distribution qui élimine à la source les déchets. Les clients participent à la mécanique en ramenant les bouteilles consignées, en se servant eux-mêmes, en faisant l’effort de penser à tarer chaque contenant : ils sont consom’acteurs. Ils affluent et échangent au sein du projet, le font évoluer (suggestions de produits…). Si Thomas et Laura sont  les fondateurs de l’épicerie Boomerang, ce sont les clients les réels acteurs d’une consommation alimentaire plus responsable, qui chaque jour agissent concrètement pour un mode de vie raisonné et participent activement à la maîtrise de leur empreinte environnementale.

Au niveau des réseaux: Boomerang agit comme activateur de réseau, en établissant des liens de confiance avec ses partenaires. Ces relations basées sur la confiance permettent l’échange de conseils, des coups de main. Au sein du Réseau Vrac, la  solidarité est très forte et très présente (recherche de fournisseurs). EcoScience Provence a fourni le support technique pour le procédé de lavage et d’embouteillage pour la consigne.

Épicerie Boomerang à Mouans-Sartoux, 04 93 12 10 22,  http://www.boomerang.bio/

Biotechnologie marine, source d’économie locale durable, quels enjeux pour l’avenir ?

Michèle Barbier (Institut de Science et Ethique, Nice : www.sciencethics.org ; Commission Internationale pour l’Exploration Scientifique de la Mer Méditerranée : www.ciesm.org)

Les biotechnologies marines, une source d’économie locale et durable, quels défis pour l’avenir ?

Les océans et les mers représentent 70% de la surface de notre planète et abritent plus de 90% de la biosphère terrestre. Les macro- et micro-organismes marins vivent dans des conditions extrêmes de température, de lumière, de pression et de salinité. Pour assurer leur survie, ils ont dû développer des capacités métaboliques uniques résultant en une gamme de métabolites secondaires avec des activités bien spécifiques. Beaucoup de ces métabolites représentent des produits commerciaux de grande valeur pour l’industrie et leur potentiel en termes de structure, de chimie et de physiologie est exploité par la(es) biotechnologie(s) marine(s). Pour exemple, la trabectédine, un métabolite extrait de l’ascidie Ecteinascuidua turibnata, est un médicament antitumoral commercialisé sous la marque Yondelis®, par PharmaMar, une société espagnole. Ce médicament est approuvé en Europe, en Russie et en Corée du Sud pour le traitement du sarcome avancé des tissus mous.

La biotechnologie marine est une technologie clé qui soutient le développement de la bioéconomie dans le but de fournir de nouveaux produits et services à la société.

C’est un marché émergent : des efforts sont déployés pour exploiter la biodiversité marine en identifiant de nouveaux produits chimiques. À l’heure actuelle, plus de 20 000 produits naturels d’origine marine ont été identifiés, ouvrant de grandes opportunités pour le développement de la biotechnologie marine. Seulement en 2012, 1241 nouveaux composés ont été décrits (Hurst D., et al., 2016). Le marché mondial des produits et procédés biotechnologiques marins est actuellement estimé à 4,8 milliards d’euros (ERA-MBT, 2017). Une grande partie de la recherche en biotechnologie marine est concentrée aux États-Unis, en Asie et en Extrême-Orient. Les pays d’Europe du Nord ont défini les biotechnologies marines comme l’une des priorités nationales. Alors que les points chauds de la biodiversité marine sont situés dans la zone équatoriale, seuls dix pays possèdent 90% des demandes de brevet associées aux gènes marins et, parmi les dix premiers, les trois premiers représentent 70% : États-Unis, Allemagne, Japon (Arnaud-Haond et al., 2011).

Qui détient quoi ?

Comment les Nations-Unies et la Commission Internationale pour l’Exploration Scientifique de la Mer Méditerranée (CIESM) assurent un partage équitable

En raison des questions de propriété intellectuelle non résolues, comme celle de savoir qui possède les ressources génétiques marines et leurs produits chimiques et qui a accès aux données du savoir, de nouvelles recommandations juridiques et politiques ont été élaborées. La Convention sur la diversité biologique (CDB), SEUL instrument international traitant de manière exhaustive de la diversité biologique et du traité international (UNCLOS – Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, 1982), met l’accent sur le développement du partage juste et équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources avec les communautés locales et vise à garantir les pays fournisseurs ou utilisateurs.

Les zones maritimes de l’UNCLOS confèrent la souveraineté sur 200 miles (zone économique exclusive, ZEE) et 350 miles (plateau continental) aux pays adjacents de cette zone.

Le Protocole de Nagoya

Le Protocole de Nagoya (2010) décrit l’engagement de la Convention sur la diversité biologique à sauvegarder la biodiversité pour les générations futures. Il fournit un cadre juridique pour l’accès et l’utilisation des ressources, dans le but d’assurer un partage équitable des avantages découlant de l’utilisation des ressources génétiques, de promouvoir le transfert de technologie, les profits de la recherche, aux pays fournisseurs-propriétaires des ressources, de renforcer les capacités et de garantir la conservation et une utilisation durable des ressources génétiques. À ce jour, 104 pays sont parties au protocole de Nagoya.

Le Protocole de Nagoya s’applique à la recherche scientifique ou à l’utilisation commerciale des ressources génétiques marines, conformément à l’espace maritime défini par l’UNCLOS.

La Charte CIESM sur le partage équitable

En 2014 et 2015, l’initiative scientifique mondiale, la Journée d’échantillonnage des océans, financée par la Commission européenne dans le cadre du projet MicroB3, visait à étudier la biodiversité et le fonctionnement des écosystèmes dans les eaux marines par la génomique, la science du séquençage des gènes et leur signification. Plus de 150 équipes scientifiques ont participé à cette initiative, dans le monde entier, laquelle a soulevé la question des « Avantages de la recherche pour qui ? ». À l’époque, le Protocole de Nagoya était en discussion et aucune législation n’avait encore été adoptée. Michèle Barbier, membre du projet, a élaboré des recommandations éthiques, via une Charte : la Charte CIESM sur l’accès et le partage des bénéfices issus des ressources génétiques marines.

Cette charte, largement présentée à l’Institut européen de bioinformatique (Cambridge, Royaume-Uni) et lors de nombreuses conférences (Oxford, Royaume-Uni ; Bruxelles, Belgique ; Szeczin, Pologne) permet de mettre l’accent sur le développement d’un partage juste et équitable des bénéfices découlant de l’utilisation des ressources marines avec les communautés locales et de garantir les pays fournisseurs ou usagers.

Les différents types de ruches.

Pour se lancer en apiculture, il faut connaître les types de ruches pour choisir celle qui hébergera vos abeilles. Celles-ci varient selon les techniques dapiculture et les régions où elles seront placées. Il existe des ruches traditionnelles, des ruche modernes, des ruches horizontales, des ruches verticales, les unes avec cadres, les autres sans cadres. Elles se composent pour la plupart, d’un corps : c’est l’endroit où les abeilles stockent leurs provisions. Et d’une hausse : c’est le stock supplémentaire que va récupérer lapiculteur.

Parmi les ruches traditionnelles, les modèles les plus ancien sont les ruches en paille, en terre cuite ou les ruches troncs. Ce sont des ruches écologiques dans le sens où l’homme n’intervient quasiment pas elles sont donc très respectueuses des abeilles à l’état naturel. D’un confort similaire à celui d’un habitat naturel, la ruche en paille a la forme dune voûte, sans socle ni rayons, avec un trou par lequel les abeilles entrent et sortent de la ruche. Parmi les ruches traditionnelles on trouve également la ruche kényane, modèle de ruche trapézoïdale et la ruche tronc qui a une durabilité dans le temps.

On trouve également des ruches verticales et horizontales. Les plus connues des ruches sont les ruches verticales.

On parle aujourd’hui beaucoup de la Ruche Warré, la ruche populaire, qui est une ruche à barrettes, à la base sans cadres, de forme carrée (30 x 30). Elle a été créée au début du siècle dernier par l’abbé Warré qui recherchait la ruche la plus respectueuse et la plus simple à construire et à utiliser. Elle a l’avantage doffrir aux abeilles de meilleures conditions de vie, et de faciliter le travail de l’apiculteur. La «ruche populaire» et son adaptation récente en « ruchecologique », est une construction qui se rapprochent bien, en dimension, de ce que les abeilles choisissent quand elles ont le choix dans la nature. Dans un tronc darbre creux ou une fissure de rocher les abeilles bâtissent le plus souvent huit rayons. La Warré est donc sur 8 cadres

Les plus répandues des ruches verticales en apiculture pour la production de miel sont:

-La ruche Dadant qui est ruche à 10 / 12 cadres.et qui est le modèle le plus utilisé en Europe. Son volume offre plus de de réserves pour les périodes d’hivernage.

-La ruche Langstroth, un autre modèle standard, très prisé par les apiculteur mais qui a une contenance de 10l de moins que la Dadant.Sa manipulation est facilitée par la taille de ses hausses (17 cm de hauteur) et par un seul type de cadre.

Il y a également la ruche Voirnot qui est une ruche cubique créée par l’abbé Voirnot à la fin du XIX siècle. Elle est très fréquemment utilisée dans les régions montagneuses et froides. Sa taille se situe entre la Dadant et la Langstroth (36 x 36 x 36).

Les ruches horizontales quant à elles sont le type de ruche qui offre aux abeilles un habitat qui ne nécessite ni cire, ni cadres préfabriqués.

De la plus écologique à la plus productive plusieurs types de ruches existent et c’est en fonction de l’endroit où vous vivez et du mode d’apiculture que vous souhaitez pratiquer que vous choisirez votre modèle de ruche.

Analyse de la Transition écologique au Port de Nice, la pollution aérienne comme enjeu : progrès et stagnation

Daniel Moatti (Chercheur associé au SIC. Lab Méditerranée, Docteur Habilité à Diriger les Recherches, membre de la Commission Locale de Proximité et de l’Environnement du port de Nice, Conseiller scientifique du FNE PACA, Président de l’ANQAEV)

Introduction – L’expertise-citoyenne

Deux ans d’un travail intense de collecte d’informations, puis de réalisation de dossiers documentaires, seront présenté enfin de sensibiliser et d’alerter les élus à tous les niveaux, des acteurs économiques et institutionnels du secteur maritime. En juin 2016, la compagnie Moby Lines ouvrait à Nice une liaison maritime quotidienne par ferries avec le port de Bastia entrant directement en concurrence avec la Corsica/Sardinia Ferries possédant jusqu’alors le monopole des liaisons entre Nice et la Corse depuis l’effondrement de la SNCM (Société nationale maritime Corse-Méditerranée). Les navires de la Moby Lines, le « Corse » et le « Zazà », possédant de très hautes cheminées, les volutes de fumées rabattues par le vent atteignaient d’autres quartiers que celui du port, dont celui proche de la gare Riquier, durant l’été 2016, jusqu’à l’incendie du Zazà dans la nuit du 13 au 14 août. Subir les mois de juin, juillet et août fenêtres fermées à Nice est une expérience traumatisante, vécue par des dizaines de milliers de riverains des ports méditerranéens français.  La création d’associations de défense de l’environnement et de riverains excédés ainsi que l’émergence d’une expertise citoyenne découlent directement de la situation conflictuelle ainsi créée.

Un site remarquable et protégé

La protection du port de Nice s’inscrit dans celle du patrimoine. C’est un espace remarquable situé près de la place Garibaldi et au pied de la place de l’île de Beauté construites au XIXe par les architectes de la famille de Savoie et inscrites aux monuments historiques. De même les collines vertes du Château à l’ouest et celle de Mont Boron à l’est avec le fort Alban participent à la singularité et la beauté du site. La grande digue du port protégeant de la houle du large est, elle-même, inscrite aux monuments historiques.

Or, les navires manoeuvrant et stationnant dans le port de Nice entrent dans un espace restreint situé à l’est de la ville. En raison du climat, de la géographie et des vents, les fumées en provenance de leurs hautes cheminées tendent à stagner ou à se déployer sur plusieurs quartiers de la ville, en particulier ceux du port et du Mont Boron.

Des carburants marins très polluants ayant des conséquences sur la santé publique

En Méditerranée, les navires utilisent des carburants très polluants. Les bateaux de commerce naviguent au fioul lourd à 3,5% de teneur en soufre, soit 3500 fois plus d’émanation d’oxyde de soufre que le diesel des véhicules terrestres (à multiplier par le poids du navire). Le fioul allégé est réservé aux navires avec passagers, à 1,5% donc 1500 fois plus d’émanation d’oxyde de soufre que le diesel terrestre.  Si un navire reste plus de deux heures à quai, il doit utiliser le diesel marin à 0,10% de teneur en soufre, soit quand même 100 fois plus d’émanation d’oxyde de soufre que le diesel terrestre.  S’ajoute un cocktail d’oxyde d’azote, de carbone de suie, de monoxyde de carbone et des particules ultrafines de 10 µ, 2,5 µ, 1 µ et inférieures.

Les conséquences sur la santé publique sont lourdes, allant des maux de tête, aux vomissements, à la multiplication des bronchites, aux pathologies cardio-vasculaires et aux cancers pulmonaires. Plusieurs rapports officiels, du Sénat, de l’ANSES, de l’Organisation Mondiale de la Santé, ont été consacrés à ces pathologies et, aussi, à leurs coûts humains et financiers. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, 36% des décès par cancer du poumon, 34% de ceux par AVC et 27% par infarctus, résultent de la pollution par les particules ultrafines. Les législations nationale, européenne et internationale en matière de carburants marins demeurent disparates. Des zones maritimes sont protégées, où le diesel marin le moins polluant à 0,1% de teneur en soufre est obligatoire : toutes les côtes des États-Unis, les mers européennes nordiques (Manche, mer du Nord, Baltique), l’Océan glacial antarctique.  Mais la Méditerranée, mer presque fermée et fragilisée, ne bénéficie toujours pas de cette protection, en dépit d’une amélioration prévue le 1er janvier 2020. Sur tous les océans et mers du monde, hormis les zones maritimes déjà au diesel marin à 0,1%, les navires circuleront obligatoirement au fioul à 0,5% maximum de teneur en soufre (500 fois plus polluant que le diesel terrestre).

La fermeté nouvelle de la Justice

La Justice dans son ensemble réagit avec vigueur face à la pollution tant aérienne que maritime. La Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) a condamné la Bulgarie1 et la Pologne2 et depuis le 17 mai 2018, les instances européennes ont déposé devant la CJUE, un dossier contre la France3. En France, la plus haute juridiction administrative, le Conseil d’Etat, par l’arrêt du 12 juillet 20174, a condamné le Gouvernement pour inaction en matière.

  • COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE, Arrêt du 5 avril 2017, condamnation de la Bulgarie, « Manquement d’État – Environnement – Directive 2008/50/CE – Qualité de l’air ambiant », affaire C488/15

  • COUR DE JUSTICE DE L’UNION EUROPEENNE, Arrêt du  22 février 2018,  condamnation de la Pologne, « Manquement d’État – Environnement – Directive 2008/50/CE – Qualité de l’air ambiant », affaire C-336/16

  • Stéphane MANDARD, « Pollution de l’air : Bruxelles poursuit la France devant la Justice »,  Le Monde du 17 mai 2018

  • CONSEIL D’ETAT, Arrêt du 12 juillet 2017, Association : Les amis de la Terre, condamnation de l’Etat, affaire 394254

Alpes-Maritimes et tourisme: entre les (trop) pleins et les vides

Sylvie CHRISTOFLE (Université Nice Sophia Antipolis) 1

La Côte d’Azur est une conurbation de plus d’un million d’habitants (INSEE), en voie de métropolisation et dotée d’une technopole d’envergure, Sophia-Antipolis ; elle est un haut–lieu du tourisme mondial avec près de 1% du total des arrivées internationales (Côte d’Azur Touriscope, Chiffres clés, 2016).
Néanmoins, cette dynamique touristique insuffle assez peu, sauf notables exceptions, le Moyen et le Haut Pays, localisés pourtant à quelques kilomètres et deux heures maximum de route de la Méditerranée, et offrant des atouts de qualité : paysages, authenticité, villages perchés, montagne… ainsi que la présence du Parc National du Mercantour et du Parc naturel régional des Préalpes d’Azur.
Pourquoi le tourisme, qui a permis de faire accéder ce littoral azuréen, autrefois marginal, à une attractivité internationale, peine-t-il depuis plus d’un siècle à dynamiser l’arrière-pays maralpin ?
La mise en place du mythe de la Riviera devenue Côte d’Azur s’est effectuée à partir de la seconde moitié du XVIIIe . Elle a concerné presque exclusivement le littoral, les montagnes du Haut Pays composant certes un arrière-plan paysager mais ne restant qu’exceptionnellement fréquentées.
L’intensification et la diffusion du tourisme commence à toucher les montagnes azuréennes qu’à la fin du XIXe. Cependant, la mise en tourisme va y rester limitée.
A contrario, le littoral des Alpes-Maritimes devient un noyau de la villégiature hivernale européenne.
Aujourd’hui, cette riviera, côte rocheuse entre mer et montagnes, concentre, sur seulement quelques kilomètres de profondeur, outre les hommes et les activités (fonctions administratives, sanitaires, commerciales, d’enseignement et de recherche, etc.), la majeure partie des équipements : gares routière, ferroviaire, autoroute, 3e aéroport de France en transport de voyageurs 2 . Le littoral est donc « plein ».
L’arrière-pays est structuré en plusieurs espaces, en fonction de l’urbanisation et de l’accessibilité, en lien avec l’important relief. Les densités humaines sont ainsi faibles dans les communes de la zone montagneuse, sous les 20 hab./km2 , excepté les bourgs de fond de vallée du moyen pays, mais toujours en deçà des 100 hab./km2
Le Moyen Pays (isochrone : 1h maximum par rapport à la côte), se scinde en deux entités. La première bénéficie de la proximité avec le bassin d’emplois du bord de mer, se révèle de plus en plus urbanisée et liée au fonctionnement littoral. Le Moyen Pays plus éloigné de la côte demeure marqué par un fonctionnement d’essence rurale et une dispersion relative des populations.
Le Haut pays est plus montagnard, et de très larges pans d’espaces sont vides d’occupation humaine ; la nature sauvage y a ses droits, particulièrement la zone au cœur du parc national du Mercantour.
L’espace maralpin est donc constitué de pleins et de vides territoriaux avec un gradient qui suit la distance à la mer, l’altitude et les principales vallées (Var, Vésubie, Tinée…)

L’étude touristique vient renforcer l’analyse des écarts entre littoral et montagne. Les espaces et les pratiques sembleraient, de prime abord, complémentaires. Le littoral est spécialisé en tourisme balnéaire, de réunions et de congrès, versé dans le grand évènementiel (carnaval de Nice, festival de Cannes…, le shopping, et est plus récemment engagé dans la reconnaissance touristique de son patrimoine matériel et immatériel. Les territoires de l’intérieur s’appuient sur des pratiques fondées sur la nature, la découverte, la détente, le repos et le sport. Néanmoins, deux éléments majeurs différencient nettement le fonctionnement touristique de ces deux entités spatiales.
En premier lieu, existe un fort différentiel dans la fréquentation. En effet, le département des Alpes-Maritimes a reçu environ 11 millions de touristes en 2016 générant près de 70 millions de nuitées (4.2% des nuitées touristiques en France) et 5,8 milliards d’euros de dépenses afférentes (Côte d’Azur Touriscope, Chiffres clés, 2016). Cependant, à peine 12 % des séjours s’effectuent dans le Moyen Pays et 4 % dans le Haut Pays. Seulement 600 000 touristes hors résidents azuréens, fréquentent donc l’arrière-pays, dont la moitié dans le seul périmètre « neige » (près de 300 000), c’est-à-dire principalement les stations (Côte d’Azur Touriscope, Chiffres clés, 2016).
En second lieu, les hébergements touristiques, notamment marchands, sont majoritairement concentrés sur le littoral. La ville de Nice dispose ainsi de près de 200 hôtels et presque 10 000 chambres, deuxième pôle national après Paris3. Cannes, Antibes, Menton… concentrent parallèlement les infrastructures touristiques. Le total de tous les hébergements marchands hors littoral reste inférieur à 20 000 lits sur les 150 000 des Alpes-Maritimes. A contrario, si le Moyen Pays présente peu d’hébergements non marchands, le Haut Pays se distingue par un fort nombre de résidences secondaires, représentant environ 125 000 lits, particulièrement à Auron, Isola 2000 et Valberg, soit de 50 à 90 % des hébergements dans ces communes !
Ces fortes disparités semblent faire écho à une mise en tourisme tardive des espaces, les montagnes maralpines, contrairement à celles de Haute-Savoie, ayant connu une fréquentation touristique temporellement décalée et parallèlement très différente de celle du littoral. Alors que la mise en
tourisme de la vallée de Chamonix, sous l’impulsion des villégiateurs anglais, est contemporaine de celle de Nice, au milieu du XVIII e siècle, il va falloir attendre plus de 100 ans avant que la montagne maralpine connaisse une véritable fréquentation touristique.
Les principaux acteurs de la touristification de l’arrière-pays n’ont pas été les touristes étrangers comme sur la côte mais les militaires, la haute société locale, plus tard les enfants des colonies de vacances. Un début d’autonomisation de ces lieux par un développement touristique a pu parfois être opéré, comme en attestent d’anciens guides touristiques et des récits relatant la présence ponctuelle de personnalités à différentes époques 4 . Néanmoins, la plus grande part du fonctionnement est en rapport étroit avec le littoral depuis la fin du XIX e et les bifurcations du système, notamment au niveau des temporalités saisonnières, vont encore renforcer ce lien. En effet, après plus de 100 ans de séjours prolongés sur le littoral en hiver, la très grande majorité des touristes fréquentant la « French Riviera » n’a toujours pas initié de fréquentation de l’arrière-pays à la fin du XIXe .
La fréquentation des lieux est donc le fait de très nombreux habitués, essentiellement azuréens. Bien sûr, l’apport, notamment économique, de cette clientèle maralpine et monégasque est remarquable.
Les hébergements marchands profitent aussi de cette clientèle locale, autour des pics de fréquentation de fin de semaine et de vacances scolaires de l’académie, générés par une clientèle « captive ».
Cependant, ces rythmes rendent les lieux vulnérables aux aléas climatiques : le faible enneigement et le mauvais temps ont des conséquences immédiates sur les chiffres d’affaires quand, au contraire, des week-ends bien enneigés sous un ciel d’azur voient converger des dizaines de milliers de véhicules saturant routes et parkings, voire hébergements 5 au point parfois d’empêcher tout accès aux stations.
Pour résumer, le littoral présente des pratiques touristiques variées et attire de très nombreux visiteurs, générant un tourisme allogène, national et international. A contrario, l’arrière-pays propose des activités de loisirs et de tourisme spécialisées dans le sport et la nature (essentiellement ski et randonnée), et ont un rayonnement bien plus limité, essentiellement les Alpes-Maritimes et Monaco, sauf Auron, Valberg et Isola 2000. Les facteurs historiques sont des éléments-clefs de compréhension : ils trouvent aujourd’hui leur prolongement, d’une part, dans la dimension spatiale essentiellement azuréenne des acteurs du système « touristique » et, d’autre part, dans une dynamique territoriale globale rendant le tourisme de moins en moins visible au sein d’un espace en voie de métropolisation.


1 Présentation adaptée d’un travail de recherche en Géographie, intitulé « L’arrière-pays maralpin, marge d’un haut lieu du tourisme mondial » publié par C. Hélion et S. Christofle dans Tourisme et périphéries – La centralité des lieux, ouvrage coordonné par N. Bernard, C. Blondy et P. Duhamel, Presses Universitaires de Rennes, 2017.
2 Plus de 11,5 millions de passagers en 2013, dont près de 4,2 millions en low cost : Union des Aéroports Français, http://www.aeroport.fr/les-aeroports-de-l-uaf/nice-cote-d-azur.php. Nice Côte d’Azur (incluant Nice, Cannes-Mandelieu et Saint-Tropez) est parallèlement le 2 e pôle européen d’affaires de France après le Bourget avec 46 936 mouvements d’avions en 2013 (Observatoire du Tourisme Côte d’Azur, http://www.cotedazur-touriscope.com/pdf/chiffres/2014/B001_CC_2014.pdf )
3 Selon l’Office du Tourisme et des Congrès de Nice.
4 Par exemple est exposée en 2014 à Saint-Etienne-de-Tinée la correspondance entre le général de Gaulle et G. Pompidou, ce dernier étant alors en villégiature à Auron.
5 Ainsi, des touristes peuvent rapidement ne pas trouver d’offre, sans même parler de qualité. Le faible nombre de lits en marché aboutit rapidement à un complet remplissage par les « Littoraux » les semaines de congés d’hiver. Hors saison, les hébergements ferment car ils ne trouvent pas d’intérêt économique à rester ouverts : c’était notamment le cas du plus grand hébergement collectif de Saint-Etienne-de-Tinée, ouvert « toute l’année », mais… pas pendant certains congés de la Toussaint ! Enfin, le stock de skis (ou d’autres matériels sportifs estivaux) des loueurs peut être vidé dès le matin, rendant impossible la pratique souhaitée par les touristes (cas du mercredi 05 mars 2014 à Gréolières-les-Neiges). Source : enquêtes terrain C. Helion.

Actions menées dans le département avec des migrants en cours d’intégration

Par Teresa Maffeis, Association pour la démocratie à Nice

L’aide aux sans-papiers : permanences, Préfecture et Tribunal

L’ADN (Association pour la démocratie  à Nice – dont je suis membre fondatrice en 1992) fait partie des membres actifs du Comité de Vigilance des Alpes Maritimes (COVIAM), fondé en 1993 afin de dénoncer les atteintes aux droits des étrangers installés en France. Ses permanences se tiennent à Nice, Cannes et Grasse, afin d’assister les étrangers lors de leurs demandes de régularisation auprès de la Préfecture. Ces permanences hebdomadaires sont gratuites et assurées par des bénévoles. Par exemple, en raison du durcissement de la législation, de plus en plus restrictive, j’accompagne chaque mercredi les requérant-e-s à la préfecture, qui bafoue souvent les textes, et nous oblige à la vigilance. Ceci implique également de participer à de nombreuses formations juridiques qui permettent d’argumenter et de rétablir les étrangers dans leurs droits.

L’aide aux réfugiés : humanitaire et juridique

à Vintimille

Les mouvements migratoires récents (depuis 2015) ou immédiatement postérieurs au Printemps Arabe nécessitent une forte implication sur le terrain en Italie et en France, là où de nombreux réfugiés affluent. 
En effet, déjà en 2011, mais surtout depuis le 15 Juin 2015, la France ferme sa frontière à Vintimille pour bloquer le passage des migrants venus d’Italie. Sur les rochers, à quelques mètres de la frontière, s’organise un camp de lutte contre cette fermeture où se rencontrent migrant.e.s et solidaires.

Depuis l’expulsion du camp fin septembre 2015, la lutte continue tant bien que mal. La répression contre les migrants prend de nouvelles formes comme les rafles massives et les déportations vers le sud de l’Italie et la Sardaigne. Présente sur tous les campements de fortune sans cesse évacués et reformés, je participe, outre l’aide humanitaire, en donnant des cours de français, ou en informant les personnes sur leurs droits, aidée par des avocats italiens présents sur place. Une coordination s’instaure sur l’accompagnement des personnes qui réussissent à passer la frontière. Ceci consiste non seulement à les accueillir à Nice, mais aussi à organiser la suite de leur voyage vers les destinations choisies, souvent pour rejoindre des membres de leurs familles ou des pays où sont installées leurs communautés.

L’image d’une France accueillante est très répandue chez les réfugiés qui nous citent souvent la devise de la France « Liberté, Égalité, Fraternité », et sont tellement convaincus que la France va les accueillir. Il nous est bien difficile de briser leur rêve de France. Depuis la fermeture de la frontière en juin 2015, dix-neuf réfugié.e.s ont péri en tentant de la franchir. Présente dans les campements, j’essaie de les mettre en garde des dangers, mais leur désir de partir est tel…

Pour eux et elles, la loi n’est encore pas respectée. Celle-ci précise qu’arrivés sur le territoire français, les réfugiés ont droit à un jour franc pour demander l’asile. J’ai rencontré de nombreux mineurs, dont certains très jeunes, qui se sont fait refouler illégalement en Italie alors que L’article 20 de la Convention Internationale relative aux Droits de l’Enfant énonce que « tout enfant » privé de son milieu familial ou en danger au sein de celui-ci a droit à une protection. Aucune condition de nationalité ni d’origine n’est donc prévue. 
Les associations locales s’organisent pour faire respecter ces droits, et je fais partie des nombreux observateurs qui, en coordination avec les avocats, participent à des veilles depuis les postes locaux de la police aux frontières (PAF) de Menton, au sein de la CAFFIM – (Coordination des Associations de la Frontière Franco-Italienne pour les personnes Migrantes). Ces observations, effectuées également dans les gares du littoral, ont permis notamment à des mineurs isolés d’être pris en charge par le foyer de l’enfance, mais on peut craindre qu’en absence de vigilance citoyenne, les atteintes aux droits des personnes continuent.

Beaucoup de mineurs qui arrivent à Nice sont hébergés en hôtel par l’administration, en attente de leur majorité, ou dans des foyers. Mais ils veulent souvent soit aller dans d’autres villes, soit rejoindre leur famille. Nous les aidons à prendre le train en payant leurs billets, leur donnons un téléphone afin de leur permettre de nous contacter en cas de problème et de nous confirmer leur arrivée. Avant leur départ, nous nous assurons qu’ils ont bien un point de chute et contactons leurs parents ou hébergeurs. Certains nous  donnent encore régulièrement de leurs nouvelles. Pour ceux et elles qui restent à Nice, associations et avocats, au sein de la CAFFIM, se mobilisent pour le respect du droit et la protection des enfants étrangers. Une permanence leur sera dédiée.

En outre, je suis souvent contactée par des associations d’autres villes qui me signalent des jeunes arrivés dans notre département et qui ont besoin de notre aide. Par exemple, j’ai organisé le retour à Marseille d’une jeune étudiante qui était allée renouveler sa carte de séjour en Italie afin de passer son bac, et qui  fut arrêtée par la police française qui l’avait ensuite laissée dans la rue, la nuit à Vintimille. Un avocat italien a pu régulariser sa situation, mais elle était terrorisée à l’idée de croiser les policiers à nouveau. Avec un solidaire de l’AdN, nous sommes allés la rechercher et avons franchi la frontière de retour sans problèmes. Elle a passé son Baccalauréat avec succès, mais cette expérience l’avait traumatisée.

Après les drames de la traversée, les migrants doivent faire face à la persécution préfectorale : en avril 2017, j’ai hébergé à Nice un couple de nationalité Érythréenne avec un enfant de 5 ans qui venait d’Italie et résidait chez des solidaires à Breil-sur-Roya depuis le 26 février 2017. Une histoire dramatique. Avec deux adhérents de l’AdN et deux traducteurs, nous avons accompagné cette famille dans le parcours difficile des « Dublinés » (règlement de l’UE appliqué à toute personne s’il est prouvé qu’elle est passée par un autre état membre de l’UE, et qui stipule qu’un seul État membre – celui d’entrée sur le territoire de l’Union – est responsable de l’examen de la demande.

Accueillis chez moi le premier soir, nous avons ensuite organisé leur suivi : accompagnements en préfecture pour effectuer une demande d’asile ; chez Forum Réfugiés pour une domiciliation ; à l’OFFII pour obtenir un hébergement et l’allocation d’aide aux demandeurs d’asile (400 € : mois) ; installation dans un hôtel meublé le lendemain (les « dublinés » n’ont pas accès au CADA – Centre Accueil des Demandeurs d’Asile – qui sont chargés de suivre les personnes dans la totalité des démarches) ; les accompagnements aux pointages au bureau de police ; traduction des courriers reçus ; l’inscription à l’école et en centre aéré de l’enfant ; suivi médical de la maman (enceinte) ;  informations et accompagnements dans les épiceries solidaires ; inscription aux cours de français ; visites et sorties amicales ; démarches auprès des avocats (…). En Juin 2017, le préfet des Alpes Maritimes ordonne leur réadmission en Italie, mais le Tribunal Administratif annule cette décision estimant que « celle-ci n’avait pas assez pris en compte l’intérêt de l’enfant ». Depuis, et malgré ce jugement, la préfecture s’acharne sur cette famille, mais un jugement rendu le 24 septembre dernier par le Conseil d’État lui donne tort, et la famille a désormais le droit de se rendre à la préfecture pour exiger la délivrance d’une attestation de procédure OFPRA.

Nous continuons à aller à Vintimille afin d’y apporter chaque semaine la collecte de vêtements et de nourriture coordonnée par l’AdN en faisant de nombreux appels à la solidarité. Celle-ci n’a jamais cessé depuis 2015, et a permis à de nombreuses personnes scandalisées de la situation des réfugies de s’investir. Je participe à de nombreuses réunions avec les acteurs de la solidarité en Italie afin de coordonner nos actions. Je suis d’ailleurs convoquée par le Tribunal d’Imperia pour ma participation à des manifestations de soutien dont le but est sans doute de me donner, ainsi qu’à d’autres, une interdiction du territoire de Vintimille.

Consciente que peu de personnes connaissaient la situation dramatique vécue par les réfugiés depuis 2015,  j’ai répondu à de nombreuses interviews, mais aussi organisé de nombreux événements et ai conçu, avec un autre membre de notre association, une exposition photo retraçant leur parcours afin de sensibiliser à leur situation et développer la solidarité, qui devrait aussi déboucher sur l’édition d’un livre. L’état des lieux est régulièrement rapporté sur le site www.adn-nice.org.

Depuis 2015, nous avons reçu beaucoup de soutiens, pas majoritairement venus de militants, qui participent aux actions d’accompagnements. Ceux-ci s’ajoutent aux nombreux et nombreuses anonymes qui ont parfois, le temps d’un soir ou d’une nuit, offert le gîte et le couvert à ces désespérés dans leur errance.

ADN – Association pour la démocratie à Nice http://www.adn-nice.org adn(à)adn-nice.org