Par Isabelle Doussan, actuelle présidente de l’association Correns 21, http://corrensagenda21.fr
Pour rappel, les agendas 21 sont nés d’une recommandation de la Conférence des Nations Unies sur l’environnement et le développement qui s’est tenue en 1992 à Rio. Un agenda 21 peut se définir comme un programme d’actions, « pour le 21ème siècle », de développement local, déclinées selon les trois dimensions du développement durable. Si, dans leur grande majorité, les agendas 21 sont définis et mis en œuvre par les collectivités territoriales, la commune de Correns1, a fait un choix différent. En effet, en 2008, le conseil municipal en a confié la responsabilité aux habitants eux-mêmes, avec pour principales recommandations :
-
d’associer toutes les volontaires au sein du village à cette démarche,
-
d’assurer la cohérence de la démarche au sein de la population et de la municipalité
-
de fixer après avoir partagé un diagnostic, des objectifs concrets et quantifiables dans le domaine du développement durable.
Concrètement, un collectif de corrençois s’est réuni en comité de pilotage (Copil), dont la présidence a été confiée à une personne qui n’était pas liée à l’équipe municipale. La composition de ce comité a été pensée afin de réunir, autant que possible, les différents points de vue et représenter les principales catégories de la population (âge, profession, association, etc.) et quatre membres du conseil municipal ont été invités à y siéger, au titre de citoyens ordinaires. Le Copil a ensuite créé quatre commissions de travail2.
La première tâche que s’est assignée ce groupe a été d’informer l’ensemble de la population de Correns du projet, et de lui demander son avis sur les grandes questions. Un questionnaire a été distribué, qui a montré un intérêt certain d’une majorité de la population et une quarantaine de personnes se sont portées volontaires pour se joindre aux équipes déjà au travail. En parallèle à cette concertation, un travail de recherche sur les documents de la commune a été effectué (PLU, données INSEE, etc.) et une vingtaine d’entretiens ont été réalisés auprès de personnes choisies selon leur statut professionnel, leur âge, leur participation à la vie du village, etc.Un « diagnostic partagé » a pu alors être fait qui a conduit à identifier la situation de Correns (ressources et handicaps) et son devenir (opportunités et menaces)3.Le travail réalisé et les premiers résultats obtenus ont été alors consignés dans un document (27 pages) largement distribué auprès de la population de Correns sous le titre : « Un agenda 21 pour Correns, diagnostic partagé ». Sur la base de cette information détaillée, un débat a été organisé, auquel a participé plus d’une centaine de personnes. Cet échange est venu enrichir les analyses réalisées et a renforcé la volonté d’appropriation de cette démarche par le plus grand nombre. Une fois le diagnostic réalisé, débattu et validé, une dizaine d’actions ont été retenues parmi les nombreuses proposées par les groupes de travail.
Les membres des commissions du Copil se sont alors répartis le travail, en vue de produire pour chacune de ces actions une fiche précisant le contexte et les éléments du diagnostic, les activités en cours, les actions à mettre en œuvre et les priorités, les résultats et les impacts attendus, ainsi que le budget correspondant. Un schéma permet d’illustrer le travail de cartographie des différentes composantes d’intervention.
Presque dix ans plus tard, on compte de très nombreuses actions réalisées ou toujours en cours : la mise en place de panneaux « points info biodiversité » à l’entrée du village ; la création d’un site internet4, la réalisation de plusieurs études scientifiques sur la faune, la flore et les pratiques agricoles ; l’édition d’un livret sur le patrimoine culinaire de Correns ; une AMAP bois de chauffage ; des jardins partagés sur une parcelle mise à disposition par la mairie ; l’analyse des consommations énergétiques et leur réduction dans les bâtiments communaux et chez les particuliers.
Au-delà de ces actions, l’agenda 21 a très certainement participé, autant qu’il a profité, de la dynamique générale de Correns en faveur du développement durable. En effet, Correns, qui a vu la quasi-totalité de la viticulture convertie en bio dès 1997, s’est autoproclamé « 1er village bio de France ». Toutefois, malgré un environnement privilégié et une municipalité très ouverte aux enjeux sociaux et écologiques5, le bilan a été fait en mai 2018 d’un essoufflement des actions de l’agenda 21 et d’un moindre intérêt des corrençois. Aussi, à l’occasion de l’AG de l’association Correns 216, en mai 2018, et du renouvellement de sa présidence, il a été décidé de relancer une phase de consultation de la population, qui s’est d’ailleurs renouvelée depuis 10 ans, afin d’établir un nouveau diagnostic, et ainsi pouvoir repenser la stratégie de l’agenda 21 et les actions concrètes à mener.
Isabelle Doussan, actuelle présidente de Correns 21
-
Correns est un village de 893 habitants en 2015, situé dans le centre Var au nord de Brignoles, sur les rives de l’Argens. http://www.correns.fr/
-
1/Partage et gestion du territoire ; 2/ Gestion des ressources et des déchets ; 3/ Communication, culture et éducation ; 4/Production, transformation et consommation responsable.
-
Les «ressources» correspondent aux « plus » de la commune (les atouts). Les « opportunités» représentent les éléments qui, s’ils se réalisaient, deviendraient des «ressources» importantes pour Correns. Les « handicaps » correspondent aux «moins» de la commune (les faiblesses) Les « menaces» représentent les éléments qui, s’ils se réalisaient, deviendraient des «handicaps» importants pour Correns.
-
Voir par ex. http://loulabo.org/
-
Association constituée fin 2011 dans l’objectif de faciliter la mise en œuvre des actions et en particulier pouvoir déposer des demandes de subvention